UNE FERME AUBERGE
Un beau jour, et par la grâce des guides, P et moi avons grimpé le petit chemin qui montait vers une ferme-auberge au creux du Périgord vert. Ignorant que nous écrivions ainsi le début d’une longue histoire d’amitié avec les propriétaires, avec le lieu, et ce petit coin de Dordogne. Pendant des années cet endroit magique a fait partie de notre vie familiale. Nous y avons réalisé un roman photos, nous avons regardé les étangs à poissons vidés de leur eau, nous nous sommes baignés, nous avons fait de la barque sur la petite pièce d’eau derrière les bâtiments de la ferme, nous avons piqué des fous rires avec J, M et leurs enfants, nous avons fait des balades à cheval à quelques kilomètres, notre fille y a nourri des lapins, des canards ou un bouc en compagnie de sa copine H, nous avons parcouru les environs en tous sens, notre chien y a fait le fou… De ce lieu, nous avons (presque) tout connu : toutes les odeurs des 4 saisons, tous les silences, toutes les saveurs. Logés tantôt dans une maison, tantôt dans une autre. Nous promenant à pied, en vélo, en voiture. Passant des heures, des jours, à prendre des photos, dessiner, bouquiner, bavarder. A tisser des liens. Jusqu’à la tempête de 2000. Elle a ravagé toute cette beauté, a exilé nos amis. Aujourd’hui, la ferme auberge que nous avons connue n’existe plus. Pourtant, elle fait partie de mon inventaire, empilement d’images et de sensations – c’est quoi la mémoire ?